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Hans Jonas, "Le principe de responsabilité : Une éthique pour la civilisation technologique"

Posted By: TimMa
Hans Jonas, "Le principe de responsabilité : Une éthique pour la civilisation technologique"

Hans Jonas, "Le principe de responsabilité : Une éthique pour la civilisation technologique"
Cerf | 1992 | ISBN: 2204041602 | French | PDF | 312 pages | 5.8 MB

Les morales traditionnelles sont devenues inopérantes en particulier pour les décideurs politiques. Hans Jonas propose une reformulation de l'éthique autour de l'idée de responsabilité, sous ses différents aspects (naturelle et contractuelle), et voit dans les parents et les hommes d'État deux modèles essentiels ; il discute les idéaux de progrès et les utopies (d'où le titre qui rappelle Le Principe espérance d'Ernst Bloch) et dessine une philosophie de l'" espérance responsable" fondée sur le respect. L'accueil réservé à cette grande œuvre - des philosophes aux décideurs politiques et des pédagogues aux scientifiques - témoigne de l'actualité d'une telle réflexion.

L'homme moderne est désormais conscient que ses technologies peuvent aboutir à l'extinction de toute vie sur Terre. Cette éventualité n'est bien sûr qu'un possible, mais elle n'est pas improbable et la peur qu'elle provoque peut fonder une nouvelle éthique de la précaution qui invite l'humanité à empêcher que le pire ne se réalise.

Dans cet ouvrage, qui a participé au renouveau de la pensée éthique contemporaine, Hans Jonas approfondit une réflexion qui s'inscrit sans doute dans le courant écologiste, mais qui invite surtout à penser les devoirs qui nous lient aux générations futures. Si le monde nous a été prêté par nos petits-enfants, comme le rappelle un proverbe indien, il faut donc tout mettre en oeuvre pour que les conditions d'une vie future authentiquement humaine sur Terre ne soient pas compromises. –Paul Klein
Le Principe responsabilité intéresse le management à plusieurs titres et très directement.

Par son titre d'abord. Ecrit il y a bientôt vingt ans, la notion de responsabilité est devenue une sorte de leitmotiv dans l'entreprise et dans la sphère publique. Ce que l'on entend quotidiennement par responsabilité dans l'entreprise, c'est la manière de renvoyer l'individu quel que soit son niveau hiérarchique à l'amplitude de son action -développement de la « responsabilisation » et de l'autonomie des agents -. La responsabilité est aussi et surtout l'obligation faite à l'individu de rendre compte des effets de ses actes face à une autre instance : hiérarchique, ou financière (actionnaire), ou politique et juridique. Cette obligation est celle de tout individu dans une fonction donnée, qu'il ait ou non, un réel pouvoir de décision.

A cet égard, on peut dire que la notion de responsabilité est entrée dans les moeurs, mais elle prend ici une autre ampleur : elle devient un principe commandé par un état donné de l'avancée technologique. La responsabilité devient principe dans une conjoncture précise dans laquelle les incidences de l'ère technologique peuvent se révéler irréversibles. Si la responsabilité est érigée en principe, c'est parce que d'autres critères sont apparus comme étant défaillants au fil du temps, au fil de la modernisation et de l'industrialisation de nos pays. Malgré toutes les prévisions scientifiques, celles-ci n'ont pas mesuré, ou ne se sont pas souciées des effets pervers contenu dans le grand projet de l'utopie du progrès.

Aussi Jonas porte t-il son adresse non pas à tout individu, mais plutôt à ceux qui décident des enjeux majeurs de notre temps, et particulièrement aux politiques. Cette adresse, on le voit aujourd'hui, pourrait s'étendre à tout décideur qu'il se place dans la sphère politique ou économique. Celui-ci n'a pas le droit de menacer la vie des autres êtres quand bien même cette menace pourrait être susceptible d'améliorer les conditions d'existence de l'ensemble de l'humanité. Implicitement, le manager doit prendre conscience de l'équilibre à trouver entre le risque nécessaire à toute action entrepreneuriale, et le risque majeur dans sa prise de décision.

Autant dire qu'un ingénieur et dirigeant ne pourra plus s'appuyer sur l'idée qu'il peut être « maître et possesseur de la nature » grâce à la technique, comme le prétendait Descartes. Pourquoi ? Parce qu'il est devenu lui-même l'objet de sa propre technologie : ce sont surtout les risques écologiques et biologiques qui sont décriés par Jonas. Reconnaissons cependant que la peur heuristique sous-jacente à tout principe de responsabilité rappelle ce fameux adage de Rabelais : « science sans conscience n'est que ruine de l'âme ». Ajoutons néanmoins que l'acuité du propos porte surtout sur le caractère inédit de notre ère dont les usages non coordonnés peuvent se révéler inéluctables.

L'enjeu du texte de Jonas porte sur un autre point. Jusqu'alors l'éthique permettait de normer nos actions en toute circonstance. La norme de vérité était celle des sciences de la nature qui proposaient un critère universel. Or, l'application technique des sciences de la nature a parfois invalidé l'idée que le critère universel scientifique pouvait constituer des normes pour nos actions, et par conséquent pouvait contribuer à fonder une éthique (morale kantienne). Par ailleurs, aujourd'hui, pour déterminer le caractère éthique d'un acte, il faut presque être un technicien du champ dans lequel s'exerce cet acte.

Ainsi assistons-nous au développement d'éthiques dans des domaines spécialisés qui supposent que nous soyons des experts des différents savoirs concernés : éthiques des affaires, bioéthique, éthique de l'information, etc. Pour Jonas, il est nécessaire de recentrer l'éthique autour d'un principe afin qu'elle ne produise pas un langage d'initié et qu'elle devienne opératoire. – Maria Bonnafous-Boucher – – Business Digest

La technologie a introduit de profondes modifications
Les avantages énormes que le progrès de la science et de la technologie ont apporté sont étroitement liés à de terrifiants inconvénients. La nature est devenue un objet de responsabilité, car la technique l'a rendue vulnérable. La technologie devient une dynamique dont nous perdons le contrôle et il est nécessaire de la normer, car elle peut engendrer des irréversibilités tant humaines que naturelles.
L'action éthique passe par de nouveaux impératifs
C'est à l'échelle collective qu'il faut aujourd'hui tenter de réguler les effets de la technologie. Le devoir des hommes d'Etat consiste désormais à privilégier systématiquement la perspective négative sur la positive lorsqu'ils prennent des décisions liées à la technologie, de manière à éviter les catastrophes.
L'action éthique a de nouveaux buts
Il faut sauver la nature pour garantir la survie de l'espèce humaine et renoncer à l'utopie du progrès, même dans une perspective d'amélioration des conditions de l'humanité.


Né en Allemagne, Hans Jonas (1903-1993) a été l'élève de Husserl et de Heidegger. Il fut professeur à Jérusalem, au Canada, à New York et à Munich. Ses principaux livres traduits en français sont La Religion gnostique (Flammarion, 1978), Le Concept de Dieu après Auschwitz (Rivages, 1994), Le Droit de mourir (Rivages, 1996), Entre le néant et l'éternité (Belin, 1996).


Hans Jonas, "Le principe de responsabilité : Une éthique pour la civilisation technologique"